Du racisme ordinaire ancestral


Métro, Ligne 5, Paris vers 18H30... J'avance sur le quai vers une rangée de sièges située vides juste avant un distributeur d'obésité en sachets ou bouteilles. Le quoi doit compter une dizaine de personnes.
5mn d'attente annonce le panneau lumineux. Je n’ôte pas mon sac de mes épaules même s'il est lourd. Je me pose juste sur un de ces sièges oranges conçus pour empêcher quiconque de s'allonger, sacro-saint mobilier urbain anti #SDF. Ces sièges ont cependant un côté pratique me concernant à ce moment précis : ne pas devoir retirer mon sac, juste m'asseoir, un peu sur le rebord et nous tenons tout les deux.
Une Dame d'un certains âge s'assoie sur le siège Guantánamo à ma droite. J'opine du chef en guise de bonsoir, bonsoir que je bafouille brièvement.

- B'soir !
- Avant on avait des gens comme vous, cheveux longs, tatoués avec des trucs dans les oreilles, maintenant il y a eux et c'est pire. Quand même non ?

Je regarde la dame, les yeux un peu plissés par la fatigue d'une longue journée et re-bafouille :
- Pardon ?
- Regardez-les. Que des Noirs, pas beaucoup de français.

Je jette mon regard sur le quai en face. De tout son long, il doit y avoir une bonne cinquantaine de personnes qui attendent après le Graal sardinier pour se rendre d'un point quelconque à un point tout aussi quelconque pour elle et pour moi. Mais non, ce que semble souligner cette dame, c'est qu'il y a beaucoup de Noirs. Voilà :

- Vous parlez des Noirs ? Là en face ?
- Eux c'est pire non ?

Je baisse la tête. J'entends le métro venir. Nous nous levons tous les deux. J'avance avec elle aux abords du quai comme si je l'accompagnais et lui dit, tranquillement :

- Vous savez Madame, promis, quand ils ne seront plus là ces "EUX", moi et mes Amis tatoués, percés à la tignasse beurrée à la Gauloise, nous reviendront vous traumatiser. Je vous souhaite bonne soirée mais faîtes gaffe, j'ai cru voir que le conducteur de la rame était noir. Personnellement je vais attendre le prochain. Mais ce n'est pas parce que c'est le conducteur qui me dérange, c'est juste votre odeur qui m'insupporte.

Je me suis retourné, n'ai pas voulu la regarder s'éloigner cette triste Dame. Je me suis reposé le temps que passe deux rames. Une fois en route, je me suis dit :

- Raconte ça, raconte ce moment

Voilà, c'est fait..

Anecdote : Demain je dois me rendre dans une boutique située à Rosa Parks dans le 19ème. Je crois qu'en sortant de la boutique, je vais me poser un moment pour repenser à la Dame du métro et à "EUX". Et à... #Charlottesville

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