#nikab #Voile #Bardo1 A méditer..Affaire du voile :
Quand dieu choisit l’ambiguité sémantique

Beaucoup d’encre a coulé sur ce qu’on appelle l’ambigüité sémantique, les exemples ne manquent pas. L’écrivain @Olfa Youssef en a mentionné dans son livre « le coran au risque de la psychanalyse ».
J’ai donc choisit de vous présenter celui qui en ce moment semble être un Sujet de controverse en Tunisie: « le voile en question »

Comme nous pouvons le constater, tous les jours de plus en plus, on voit des femmes voilées partout ou on va…avec un hijab ou une burka (nom générique du voile). Personnellement ça m’agace de voir souvent nos jeunes facilement manipulées et influencées par certains qui prétendent avoir bien étudié le Livre Saint. Je vous propose de le faire vous-même, et vous vous rendrez compte finalement, que le fait de devoir couvrir les cheveux pour la femme et certaines parties de son corps n'a jamais été prescrit explicitement par le Coran .

« Rares sont les thèmes coraniques qui soulevé plus de polémiques que la question du voile. Sans doute est ce du à sa portée sémiotique évidente, au fait qu’il exprime l’appartenance à un groupe idéologique ou social déterminé, ou encore à ce qu’il dit de la femme et son émancipation, enjeu intellectuel ou politique chez bon nombre de penseurs musulmans ou non.
Le voile est, entre musulmans, le sujet controversé par excellence.

Pourtant, il est loin d’etre un souci central dans le Coran, puisque seuls 3 versets l’évoquent. L’un d’eux ne concerne que les épouses du Prophètes : « si vous avez quelque demande à faire à ses femmes, faites-le derrière un voile… »(33 :53), le second s’adresse aux épouses du prophète et élargit l’ordre pour y intégrer les croyantes : « Ô Prophète, prescris à tes épouses, à tes filles et aux femmes des croyants de ramener sur elles leur jilbab (tunique), c’est pour elles le meilleur moyen de se faire reconnaitre et de ne pas être offensées… »(33 :59).

Ce verset ne prescrit pas une manière précise de se vêtir, et s’il ordonne de couvrir de leur jilbab, c’est pour se prémunir des agressions courantes de la part des mécréants à l’égard des femmes qui sortaient –seules, semble-il , le soir. C’est en tout cas suite à un tel incident que selon al-Tabari, ce verset fut révélé.
D’autres exégètes précisent que ce verset ne s’adresse qu’aux femmes de condition libre afin qu’elles se distinguent par leur vêtements des femmes esclaves. Les historiens rapportent que ‘Umar ibn al-Khattab’, compagnon du prophète et par la suite deuxième calife, fouettait toute esclave qui osait porter le jilbeb exclusivement réservé aux femmes de condition libre.

Un autre Khabar attribué à Abu Hurayra dit qu’après la victoire remportée contre les juifs de Khaybar, le prophète Muhammad a résidé entre Khaybar et Médine trois jours afin de fêter et consommer son mariage avec Safiyya Bint Huyayy. Abu Hurrayra aurait invité les musulmans pour assister à la fête.

Ces derniers s’étant demandé s’il fallait considérer Safiyya comme une épouse du prophète et donc comme l’une des mères des croyants ou sil elle était juste une esclave parmi les captives de guerre (milk yamin), certains ont répondu : « si elle porte un hijab, elle est mère des croyants et si elle n’en porte pas, elle n’est que milk yamin » Selon tous ces akhbar, se couvrir d’un hijab aurait une fonction sémiotique distinctive.
Et al-Zamakhshari d’expliciter que cette situation était due au fait que les hommes harcelaient les femmes esclaves qui sortaient la nuit. Ce harcèlement apparemment admis par la société ne devait par contre pas toucher les femmes libres ; ainsi pour éviter toute confusion et éviter le harcèlement par mégarde des femmes libres en les prenant pour des esclaves, le Coran aurait ordonné aux musulmanes de condition libre de se vêtir autrement que les esclaves. Dés lors, si l’on se base sur ce seul verset, le port du voile est étroitement dépendant des conditions historiques et sociales. C’est pourquoi on considère que c’est un autre verset qui prescrit effectivement le port du voile pour toute musulmane : « Commande aux femmes qui croient de baisser les yeux et d’être chastes, de ne découvrir de leur ornements que ce qui est en évidence, de couvrir leurs seins de voile, de ne faire voir leurs ornements qu’à leurs maris… »(24 :31). Les nombreux vocables de sens indéterminé que contient ce verset ouvrent à de multiples interprétations. L’ambigüité des termes employés ici ressortit à ce que les linguistes appellent « flou de la catégorie ». En effet, tout vocable dénote plusieurs éléments appartenant à un ensemble déterminé.

Si l’on utilise le vocable « chien », le récepteur percevra toutes sortes de créatures susceptibles d’appartenir à la catégorie du chien , donc susceptibles d’être nommées « chiens ». Cependant les catégories sémantiques ne sont pas aussi délimitées que l’exemple précité le fait croire. A plusieurs reprises le récepteur peut hésiter quant à l’appartenance de certains éléments à un ensemble sémantique quelconque. Le pingouin, par exemple, appartient-il ou non à la catégorie des oiseaux, bien qu’il ne vole pas ? Le prêtre catholique appartient-il à la catégorie des célibataires ? et l’hésitation risque d’arriver à son comble dés qu’il s’agit d’éléments sémantiques considérés comme subjectifs ou normatifs. Les gens s’entendent rarement sur les référents du « beau » ou du « bon ». ils sont pas plus en accord sur les référents des éléments basés sur le continum. A partir de quelle taille, par exemple, peut-on parler d’une personne grande ou petite, voire très grande ou très petite ? A partir de quelle teinte de turquoise passe-t-on du vert au bleu ?
C’est cette difficulté de préciser l’appartenance d’un élement à une catégorie sémantique qui est appelée « flou de la catégorie ».

Dans notre verset, deux termes sont concernés par ce flou : « ORNEMENTS » (Zina) et « EN EVIDENCE » (mâdhahara). Certains exégètes limitent l’ornement aux accessoires que la femme utilise pour mettre sa beauté en valeur, tels que les bijoux, le maquillage ou les vêtements ; d’autres exégètes par contre élargissent le sens de l’ornement pour qu’il incluse les attributs physiques de la femme, on pourrait alors traduire zina par « atours ». Même cette définition, ne précise pas clairement ce qui est ou n’est pas zina, et s’il est permis ou non de laisser « en évidence » pieds, mains, cheveux, yeux…Suivant les lieux er les époques, ce qu’il convient à une femme de cacher varie considérablement : que l’on songe qu’en France, il ya à peine un siècle, une femme qui laissait entrevoir une cheville étai considérée comme particulièrement entreprenante.

Ce flou qui ressortit au caractère subjectif et normatif des termes employés est encore plus vrai pour ce qui est de couvrir certains « ornements » et d’en laisser d’autres découverts, ceux qui justement sont « en évidence », cela signifie que « en évidence » n’est pas synonyme, comme on aurait pu le penser, de « visible » ; sinon le verset prescrirait de couvrir ce qui est à couvrir et de laisser découvert ce qui est à laisser visible, et ne nous apprendrait rien du tout. Ce flou contraste nettement avec la suite du verset, qui détaille méthodiquement les catégories précises des personnes à qui il est permis de « montrer leurs ornements ».
Déjà al-Tabari, au 2ème siècle de l’hégire, insistait sur cette pluralité de références dans notre verset . On comprend alors aisément que les interprétations des ornements évidents et donc des ornements évidents et donc des ornements à découvrir aient été si différentes selon les exégètes. Le visage, les pieds, les mains, les cheveux, les bijoux et autres ont été tour à tour considérés comme ornements découvrables pour certains, et nécessairement couverts pour d’autres. Cette pluralité est toujours manifeste, et l’on peut croiser aujourd’hui même des musulmanes portant le Niqâb ( voile qui cache entièrement le visage), comme l’on peut rencontrer d’autres se couvrant tout le corps, visage compris ; de même on peut rencontrer des croyantes se couvrant tout le corps excepté le visage et finalement d’autres découvrant cheveux, bras et jambes. Toutes se référant à un même et unique verset dont l’émetteur a construit l’ambiguité par un double procédé : utiliser des catégories floues telle que l’ « évident » d’une part et ne point nommer les parties corps-à part les seins- qu’il est demandé de voiler d’autre part. Et bien les
Fuqahâ( juristes de l’islam) arguent de l’ijmâ pour légitimer le port du voile, il est claire que le Coran a adopté l’équivoque pour ce sujet.


Extrait du livre « Le Coran au risque de la psychanalyse » de @Olfa Youssef - Pages( 21-25)

Reply · Report Post