Parmi les nombreux jeunes enlevés car opposants ou susceptibles de s'opposer, voici le témoignage d'un prisonnier rescapé de #Tripoli:

Il a d'abord été capturé à la frontière libyenne à Ras-Jader. Il arrivait de Derna, c'est pourquoi il a d'abord été détenu là. Ils l'ont mis dans Ras Jader et l'ont laissé seul 2 jours. Ensuite ils l'y ont interrogé. Par chance le type était bon. Il lui a dit que s'il pouvait faire semblant d'être malade alors il pourrait être amené à l'hôpital d'où il pourrait peut-être s'échapper avec un peu de chance. C'est ce qu'ils ont fait, il s'y est retrouvé, examiné d'abord par un médecin pakistanais. Au début il lui parlait en anglais, de n'importe quoi, mais un autre médecin est entré, un libyen à la solde de Kadhafi, qui l'a examiné méticuleusement. Il lui a dit qu'il était en bonne santé et qu'il était un simulateur.

À partir de là, il a été emmené dans une prison d'Al-Jamel. Avant de l'embarquer ils lui ont fait une injection qui l'a rendu incapable de bouger ses bras ou de résister. Il ne contrôlait plus son corps lorsqu'ils l'ont emmené à la prison. Ensuite ils ont commencé à le battre. à cause de l'injection il n'était pas capable de même tenter de parer les coups, ni de bouger ses mains. Il ne pouvait pas se protéger contre les coups de pieds et de poings qu'il recevait.

Voici quelques unes des "méthodes" qu'ils pratiquent contre eux :

- Ils les enferment dans une pièce noire et les frappent avec des bâtons en utilisant des lunettes de vision nocturne et en riant beaucoup. C'est un jeu rigolo pour eux.

- Ils les mettent dans une pièce où ils sont entraînés au Taekwondo et au Judo par des instructeurs qui font l'entraînement et ils s'exercent sur eux tout en portant des masques cachant leurs visages.

- Si un prisonnier ne se comporte pas bien alors ils l'emmènent dehors et le mettent dans une voiture, genre "express", pendant 5 jours sans en sortir, pas de toilettes donc ils font dans la voiture. Imaginez combien de personnes sont passées avant vous, à quoi ressemble la voiture et leurs sourires quand ils vous balancent dedans. La nuit, ils sont ivres et ils prennent alors la voiture avec le prisonnier dedans. C'est un jeu pour eux de le faire tous les soirs, une façon de frimer entre eux. Après quoi ils garent la voiture à moitié sur le trottoir parce que c'est difficile de dormir dedans ainsi.

Ces choses, ils ne les font pas parce qu'ils cherchent à obtenir des renseignements, ils les font pour s'amuser. Ils ne cherchent pas à enquêter, ni rien. Ils le font, c'est tout.

Il m'a dit qu'il y a des prisonniers de tous les âges, ça commence à 12-13 ans. Il a été avec un garçon de 13 ans qui était battu exactement comme ils le font avec les gens de 20 ou 30 ans. Certains deviennent paralysés à force d'être battus. Ils les laissent comme ça pendant des semaines, interdisant à quiconque de leur venir en aide.

Il a parlé du courage de ce gamin de 13 ans, ça semble fou par moments : "De temps à autres ils venaient nous demander "T'as fait quoi ?" Je répondais "Rien monsieur" et ils me battaient sans en tenir compte. Ils demandaient au gamin "Toi, t'as fait quoi ?" Chaque fois il se levait et leur répondait "J'ai planté le drapeau de l'indépendance dans ma rue et dehors Kadhafi !" alors ils le frappaient encore plus. J'ai essayé de lui dire d'arrêter de dire ça mais il répondait toujours "Je n'ai pas peur. Je veux qu'ils sachent ce que j'ai fait." Il est resté 4 jours avec lui et ne l'a jamais revu depuis son transfert à la prison d'Abu-Salim.

Il m'a parlé des nombreuses fois où les FFs ont essayé de prendre la prison, essayant de les libérer. Une fois les FFs sont venus attaquer et les voyous de Kadhafi sont partis, ont fuit la prison, mais les FFs sont repartis aussi en ignorant que les voyous n'étaient plus là. Alors ils ont essayé de casser les portes par eux-mêmes. Certains ont pu, pas la majorité, alors ils ont crié à l'aide mais personne n'est venu pour eux. Après quelques heures les voyous sont revenus.

Une autre fois une frappe de l'OTAN a touché leur prison, détruit un bâtiment. Cette fois aussi les voyous se sont enfuis, courant pour leur vie, un paquet de prisonniers de ce bâtiment a réussi à s'échapper mais personne n'a entendu les autres crier à l'aide.

Une des choses qu'il m'a dites, toujours dans sa tête, c'est que vous vous endormez et vous vous réveillez au son des cris d'appel au secours et des pleurs des autres, toute la journée. Certains prisonniers en deviennent fous, ont des problèmes mentaux, ceci s'ajoutant aux effets des tortures électriques qu'ils subissent, des tabassages trop fréquents.

Il a su un jour avant qu'il sortait, alors il a essayé de retenir au maximum les noms et adresses de ses codétenus. Une fois sorti, il s'est rendu dans les familles pour leur dire que leur fils était vivant. Personne n'avait la moindre idée sur eux, au courant de strictement rien.

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